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chofes. Mais cet ordre ne tarda pas à s’altérer. Ceux qui commandoient s’accoutumèrent aisément à ſe croire d’une nature ſupérieure à ceux qui leur obéiſſoient. Ils les éloignèrent d’eux & les avilirent. Ce mépris eut des ſuites funeſtes. On s’accoutuma à regarder ces malheureux comme des eſclaves, & ils le devinrent. Chacun en diſpoſa de la manière la plus favorable à ſes intérêts ou à ſes paſſions. Un maître qui n’avoit plus beſoin de leur travail, les vendoit ou les échangeoit. Celui qui en vouloit augmenter le nombre, les encourageoit à ſe multiplier.

Lorſque les ſociétés, devenues plus fortes & plus nombreuſes, connurent les arts & le commerce, le foible trouva un appui dans le magiſtrat, & le pauvre des reſſources dans les différentes branches d’induſtrie. L’un & l’autre ſortirent, par degrés, de l’eſpèce de néceſſité où ils s’étoient trouvés de prendre des fers pour obtenir des ſubſiſtances. L’uſage de ſe mettre au pouvoir d’un autre, devint de jour en jour plus rare ; & la liberté fut enfin regardée comme un bien précieux & inaliénable.