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ſon ſang, périſſent après lui. La fureur s’étend. Tout ce qui oſe ſe montrer dans les rues & dans les places, eſt regardé comme ennemi, & tombe ſous le glaive. Bientôt les maiſons & les temples ſont comblés de carnage, & ne préſentent que des cadavres défigurés. L’avarice qui ne veut voir dans tous les riches que des partiſans de l’ancien gouvernement, eſt encore plus furieuſe que la haine, & la rend plus active, plus ſoupçonneuſe, plus implacable. L’image d’une place remportée d’aſſaut par une nation barbare, ne donneroit qu’une foible idée du ſpectacle d’horreur qu’offrirent en ce moment des brigands, qui reprenoient ſur leurs complices le butin dont ceux-ci les avoient fruſtrés.

Les jours qui ſuivent ces jours de deſtruction, éclairent des forfaits d’un autre genre. L’âme du jeune Almagro, qu’on a revêtu de l’autorité, paroit faite pour la tyrannie. Tout ce qui a ſervi l’ennemi de ſa maiſon eſt inhumainement proſcrit. On dépoſe les anciens magiſtrats. Les troupes reçoivent de nouveaux chefs. Les tréſors du prince & la fortune de ceux qui ont péri ou qui ſont abſens, deviennent la proie de l’uſurpateur. Ses