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XVII. Quelle fut la condition des femmes ſur les bords de l’Orenoque, & quelle elle eſt encore.

Avant l’arrivée des Européens, les peuples qui traverſent ou qui fréquentent ce fleuve voiſin du brûlant équateur, ne connoiſſoient, ni vêtemens, ni police, ni gouvernement. Libres ſous le joug de la pauvreté, ils vivoient la plupart de chaſſe, de pêche, de fruits ſauvages. L’agriculture devoit être peu de choſe, où l’on n’avoit qu’un bâton pour labourer la terre, & des haches de pierre pour abattre les arbres qui, après avoir été brûlés ou pourris, laiſſoient un terrein propre à former un champ.

Les femmes étoient dans l’oppreſſion ſur l’Orenoque, comme dans toutes les régions barbares. Tout entier à ſes beſoins, le ſauvage ne s’occupe que de ſa sûreté & de ſa ſubſiſtance. Il n’eſt ſollicité aux plaiſirs de l’amour que par le vœu de la nature qui veille à la perpétuité de l’eſpèce. L’union des deux ſexes, ordinairement fortuite, prendroit rarement quelque ſolidité, dans les forêts, ſi la tendreſſe paternelle & maternelle n’attachoit les époux à la conſervation du fruit de leur union. Mais avant qu’un premier enfant puiſſe ſe ſuffire à lui-même, il en naît d’autres auxquels on ne peut refuſer les mêmes ſoins.