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grands avoient profité des troubles civils pour ſe rendre indépendans : on les abaiſſa ; & les poſtes importans furent tous confiés à des étrangers, qui ne vouloient ni ne pouvoient former des factions. La milice étoit en poſſeſſion de diſpoſer du trône ſuivant ſon caprice : on la contint par des troupes étrangères, qui avoient une religion & des habitudes différentes. L’anarchie avoit rendu les peuples enclins à la sédition : on plaça dans les villes & dans les campagnes des colonies choiſies entre les nations les plus opposées aux anciens habitans, par les mœurs & le caractère. Il ſortit de ces arrangemens le deſpotiſme le plus abſolu, peut-être, qu’ait jamais éprouvé aucune contrée.

Ce qui eſt étonnant, c’eſt que le grand Abbas ait ſu allier à ce gouvernement, oppreſſeur de ſa nature, quelques vues d’utilité publique. Il appella tous les arts à lui, & les établit à la cour & dans les provinces. Tous ceux qui apportoient dans ſes états un talent, quel qu’il fût, étoient sûrs d’être accueillis, d’être aidés, d’être récompensés. Il diſoit ſouvent, que les étrangers étoient le plus bel ornement d’un empire, & donnoient plus