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chine, & du contrat ſocial qui ſe fit entre la nation & ſon conducteur, avant de paſſer le fleuve qui ſépare les Cochinchinois du Tonquin. C’étoient des hommes las d’oppreſſion. Ils prévirent un malheur qu’ils avoient éprouvé, & voulurent ſe prémunir contre les abus de l’autorité, qui, d’elle-même, tranſgreſſe ſes limites. Leur chef qui leur avoit donné l’exemple & le courage de ſe révolter, leur promit un bonheur dont il vouloit jouir lui-même, celui d’un gouvernement juſte, modéré, paternel. Il cultiva avec eux la terre où ils s’étoient ſauvés enſemble. Il ne leur demanda jamais qu’une ſeule rétribution annuelle & volontaire, pour l’aider à défendre l’état contre le deſpote Tonquinois, qui les pourſuivit long-tems au-delà du fleuve qu’ils avoient mis entre eux & ſa tyrannie.

Ce contrat primitif a été religieuſement obſervé durant plus d’un ſiècle, ſous cinq ou ſix ſucceſſeurs de ce brave libérateur : mais il s’eſt enfin altéré & corrompu. Cet engagement réciproque & ſolemnel ſe renouvelle encore tous les ans, à la face du ciel & de la terre, dans une aſſemblée générale de la nation, qui ſe tient en plein champ, où le