Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v2.djvu/332

Cette page n’a pas encore été corrigée
318
Histoire philosophique

VIII. Mœurs des habitans de Surate.

Elles étoient la plupart entre les mains des Banians. Ces négocians étoient renommés pour leur franchiſe. Quelques momens leur ſuffiſoient pour terminer les affaires les plus importantes. Elles ſe traitoient généralement dans les bazards. Celui qui vouloit vendre annonçoit, en peu de mots & à voix baſſe, la valeur de ſa marchandiſe. On lui répondoit en mettant une main dans la ſienne, ſous quelque voile. L’acheteur marquoit par le nombre des doigts qu’il plioit ou qu’il étendoit, ce qu’il prétendoit diminuer du prix démandé ; & le plus ſouvent le marché ſe trouvoit conclu, ſans qu’on eût proféré une parole. Pour le ratifier, les contractans ſe prenoient une ſeconde fois la main ; & un accord fait avec cette ſimplicité étoit toujours inviolable. Si, ce qui étoit infiniment rare, il ſurvenoit des difficultés, ces hommes ſages conſervoient, dans les diſcuſſions les plus compliquées, une égalité & une politeſſe dont nous ne nous formerions pas aisément l’idée.

Leurs enfans qui aſſiſſoient à tous les marchés, ſe formoient de bonne heure à ces mœurs paiſibles. À peine avoient-ils une lueur de raiſon, qu’ils étoient initiés dans