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Histoire philosophique

de l’opium qui va dans les terres, il en ſort tous les ans par mer, ſix cens mille livres peſant. Cet opium n’eſt pas raffiné, comme celui de Syrie & de Perſe, dont nous nous ſervons en Europe. Ce n’eſt qu’une pâte ſans préparation, qui fait dix fois moins d’effet que l’autre.

Les peuples, qui ſont à l’Eſt de l’Inde, ont tous le goût le plus vif pour l’opium. Vainement les loix de la Chine ont condamné au feu, les vaiſſeaux qui en porteroient dans l’empire, les maiſons qui le recevroient ; la conſommation n’en a pas été moins forte. Elle eſt encore plus conſidérable à Malaca, à Bornéo, dans les Moluques, à Java, à Macaſſar, à Sumatra, dans toutes les iſles de cet archipel immenſe. Ces Inſulaires le fument avec le tabac. Ceux d’entre eux qui veulent tenter quelque action déſeſpérée, s’enivrent de cette fumée. Dans leur ivreſſe, ils ſe jettent ſur le premier objet qui ſe préſente, ſur un homme qu’ils n’ont jamais vu, comme ſur l’ennemi le plus implacable. Ces atrocités n’ont pas convaincu les Hollandois, maîtres des lieux où l’opium à de plus dangereuſes influences, de l’obligation d’en arrêter ou même d’en borner