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pas ainſi, on ne peut en accuſer que le génie oppreſſeur du gouvernement.

Ce mauvais eſprit eſt, pour le moins, auſſi ſenſible à Calicut. Toutes les nations y ſont reçues, mais aucune n’y domine. Le ſouverain qui lui donne aujourd’hui des loix, eſt brame ; ou le peuple eſt ſous le gouvernement théocratique, qui devient avec le tems le plus mauvais des gouvernemens, la main des dieux appeſantiſſant le ſceptre des tyrans, & la ſainteté de l’une des autorités ſoumettant en aveugle & ſous peine de ſacrilège aux caprices de l’autre. Les ordres du deſpote ſe tranſforment en oracles, & la déſobéiſſance des ſujets eſt qualifiée de révolte contre le ciel. Le trône de Calicut eſt preſque le ſeul de l’Inde occupé par cette première des caſtes. On en voit régner ailleurs de moins diſtinguées. Il y en a même de ſi obſcures ſur le trône, que leurs domeſtiques ſeroient déſhonorés & chaſſés de leurs tributs, s’ils s’aviliſſoient juſqu’à manger avec leurs monarques. Ces gens-là n’ont garde de ſe vanter d’avoir ſoupé chez le roi. Ce préjugé n’eſt peut-être pas plus ridicule qu’un autre. Il abat l’orgueil des princes ; il guérit