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invincible ſe répandoit autour d’elle. Le déſir, mais le déſir timide la ſuivoit en ſilence. Le ſeul homme honnête auroit osé l’aimer, mais n’auroit osé le lui dire.

Je cherche par-tout Eliza. Je rencontre, je ſaiſis quelques-uns de ſes traits, quelques-uns de ſes agrémens épars parmi les femmes les plus intéreſſantes. Mais qu’eſt devenue celle qui les réuniſſoit ? Dieux qui épuisâtes vos dons pour former une Eliza, ne la fites-vous que pour un moment, pour être un moment admirée & pour être toujours regrettée ?

Tous ceux qui ont vu Eliza la regrettent. Moi, je la pleurerai tout le tems qui me reſte à vivre. Mais eſt-ce aſſez de la pleurer ? Ceux qui auront connu ſa tendreſſe pour moi, la confiance qu’elle m’avoit accordée, ne me diront-ils point : Elle n’eſt plus, & tu vis ?

Eliza devoit quitter ſa patrie, ſes parens, ſes amis pour venir s’aſſeoir à côté de moi, & vivre parmi les miens. Quelle félicité je m’étois promiſe ! Quelle joie je me faiſois de la voir recherchée des hommes de génie ; chérie des femmes du goût le plus difficile ?