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ſentir que la ſuperſtition ſeule ne le guidoit pas. Il exigea que chaque pèlerin, de quelque pays qu’il fût, achetât & fit bénir cinq pièces de toile de coton, pour ſervir de ſuaire, tant à lui, qu’à tous ceux de ſa famille, que des raiſons valables auroient empêché d’entreprendre ce ſaint voyage.

Cette politique devoit faire, de l’Arabie, le centre d’un grand commerce, lorſque le nombre des pèlerins s’élevoit à pluſieurs millions. Le zèle s’eſt ſi fort ralenti, ſurtout à la cote d’Afrique, dans l’Indoſtan & en Perſe, à proportion de l’éloignement où ces pays ſont de la Mecque, qu’on n’y en voit pas plus de cent cinquante mille. La plupart ſont Turcs. Ils emportent ſept cens cinquante mille pièces de toile, de dix aunes de long chacune, ſans compter ce que pluſieurs d’entre eux achètent pour revendre. Ils ſont invités à ces ſpéculations, par l’avantage qu’ils ont en traverſant le déſert, de n’être pas écrasés par les douanes & les vexations qui rendent ruineuſes les échelles de Suez & de Baſſora. L’argent de ces pèlerins, celui de la flotte, celui que les Arabes ont tiré de la vente de leur café, va ſe perdre