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nations conquérantes ne firent jamais la vingtième partie des nations conquiſes ; parce que les unes attaquoient avec la moitié de leur population, & les autres ne ſe défendoient qu’avec le centième de leurs habitans. Mais un peuple qui combat tout entier pour lui-même, eſt plus fort que dix armées de princes ou de rois.

Au reſte, ces guerres longues & cruelles, qui remplirent l’hiſtoire ancienne, détruiſent l’exceſſive population qu’elles ſemblent annoncer. Si, d’un côté, les Romains travailloient à réparer, au-dedans, les vuides que la victoire faiſoit dans leurs armées, cet eſprit de conquête, dont ils étoient dévorés, conſumoit au-moins les autres nations. À peine les avoient-ils ſoumiſes, qu’ils les incorporoient dans leurs armées, & les minoient doublement par les recrues & les tributs. On ſait avec quelle rage les peuples anciens faiſoient la guerre ; que ſouvent, dans le ſiège d’une ville, hommes, femmes, enfans, tout ſe jettoit dans les flammes, plutôt que de tomber au pouvoir du vainqueur ; que, dans les aſſauts, tous les habitans étoient paſſés au fil de l’épée ; que,