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tion exagérée & pompeuſe de cet armement ſi formidable. Mais ce qui répandit la terreur & l’admiration il y a deux ſiècles, ſerviroit de risée aujourd’hui. Les plus grands de ces vaiſſeaux ne ſeroient que du troiſième rang dans nos eſcadres. Ils étoient ſi peſamment armés & ſi mal gouvernés, qu’ils ne pouvoient preſque ſe remuer, ni prendre le vent, ni venir à l’abordage, ni obéir à la manœuvre dans des tems orageux. Les matelots étoient auſſi lourds que les vaiſſeaux étoient maſſifs, les pilotes preſqu’auſſi ignorans que les matelots.

Les Anglois, qui connoiſſoient déjà toute la foibleſſe & le peu d’habileté de leurs ennemis ſur la mer, ſe reposèrent du ſoin de leur défaite ſur leur inexpérience. Contens d’éviter l’abordage de ces peſantes machines, ils en brûlèrent une partie. Quelques-uns de ces énormes galions furent pris, d’autres déſemparés. Une tempête ſurvint. La plupart avoient perdu leurs ancres ; ils furent abandonnés par l’équipage à la fureur des vagues, & jetés, les uns ſur les côtes occidentales de l’Écoſſe, les autres ſur les côtes d’Irlande. À peine la moitié de cette