Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/206

Cette page n’a pas encore été corrigée

en faut croire les juges les plus expérimentés, il n’y mit pas les modifications qu’auroit exigées la différence des eſprits, des conſtitutions & des armes. Ses élèves, tout grands capitaines qu’ils étoient, n’osèrent pas être plus hardis ou plus éclairés que lui ; & cette timide circonſpection empêcha les changemens, arrêta les progrès qu’on auroit dû faire. Seulement, Cohorn & Vauban ouvrirent les yeux à l’Europe ſur l’art de défendre, mais ſur-tout d’attaquer les places. Par une de ces contradictions qui ſe remarquent quelquefois dans les nations comme parmi les individus, il arriva que, malgré ſon caractère bouillant & impétueux, le François ſe montra plus propre qu’aucun peuple aux ſièges ; & qu’il parut acquérir au pied des murailles la patience & le ſens froid qui lui manquent le plus ſouvent dans les autres opérations militaires.

Le roi de Pruſſe parut, & avec lui naquit un ordre inconnu de choſes. Sans ſe laiſſer impoſer par l’exemple ou l’autorité de ceux qui l’avoient précédé, ce prince créa une tactique preſqu’entièrement nouvelle. Il fit voir que des troupes, en quelque nombre