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des deux Indes.

& paiſibles à ſa gauche ; comme ſi l’auteur de la nature tournoit tout-à-coup, en ces deux momens d’équilibre, la balance des fléaux & des bienfaits qu’il tient perpétuellement en ſes mains. Peut-être même eſt-ce dans l’Inde, où les deux empires du bien & du mal ſemblent n’être ſéparés que par un rempart de montagnes, qu’eſt né le dogme des deux principes, dogme dont l’homme ne s’affranchira peut-être jamais entièrement, tant qu’on ignorera les vues profondes de l’être tout-puiſſant qui créa l’Univers. Pourquoi une éternité s’étant écoulée, ſans que ſa gloire eût beſoin de ſe manifeſter par ce grand ouvrage, & ſans que ſa félicité en exigeât l’exiſtence, ſe détermina-t-il à le produire dans le tems ? Pourquoi ſa ſageſſe y laiſſa-t-elle tant d’imperfections apparentes ? Pourquoi ſa bonté le peupla-t-elle d’êtres ſenſibles, qui devoient ſouffrir, ſans l’avoir mérité ? Pourquoi le méchant qu’il hait, y proſpère-t-il ſous ſes yeux, & le bon qu’il chérit, y eſt-il accablé d’afflictions ? Pourquoi les innombrables fléaux de la nature y frappent-ils indiſtinctement l’innocent & le coupable ? Juſqu’à ce que ces obſcurités