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Histoire philosophique
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mieux ſentir la haine. C’eſt-là que l’homme étoit un loup pour l’homme. Il ſembloit que l’envie de ſe nuire, & non le beſoin de s’entr’aider, les eût raſſemblés en ſociété. Le Javanois n’abordoit point ſon frère, ſans avoir le poignard à la main ; toujours en garde contre un attentat, ou toujours prêt à le commettre. Les grands avoient beaucoup d’eſclaves qu’ils achetoient, qu’ils faiſoient à la guerre, ou qui s’engageoient pour dettes. Ils les traitoient avec inhumanité. C’étoient les eſclaves qui cultivoient la terre, & qui faiſoient tous les travaux pénibles. Le Javanois mâchoit du bétel, fumoit de l’opium, vivoit avec ſes concubines, combattoit ou dormoit. On trouvoit dans ce peuple beaucoup d’eſprit ; mais il y reſtoit peu de traces de principes moraux. Il ſembloit moins un peuple peu avancé, qu’une nation dégénérée. C’étoient des hommes, qui, d’un gouvernement réglé, étoient paſſés à une eſpèce d’anarchie ; & qui ſe livroient ſans frein aux mouvemens impétueux que la nature donne dans ces climats.

Un caractère ſi corrompu ne changea rien aux vues de la compagnie ſur Java. Elle pouvoit