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plication n’eſt pas, ſans doute, univerſellement adoptée dans l’Inde. Elle aura été imaginée par quelque dévot mélancolique & d’un caractère dur : car le dogme de la tranſmigration des âmes ſemble annoncer, dans ſon origine, plus d’eſpérances que de craintes.

En effet, il eſt naturel de penſer que ce ne fut d’abord qu’une idée flatteuſe & conſolante pour l’humanité, qui s’accrédita facilement dans un pays, où les hommes jouiſſant d’un ciel délicieux & d’un gouvernement modéré, commencèrent à s’appercevoir de la brièveté de la vie. Un ſyſtême qui la prolongeoit au-delà de ſes bornes naturelles, ne pouvoit manquer de réuſſir. Il eſt ſi doux à un vieillard qui ſent échapper tout ce qu’il a de plus cher, d’imaginer qu’il pourra jouir encore, & que ſa deſtruction n’eſt qu’un paſſage à une autre exiſtence ! Il eſt ſi conſolant pour ceux qui le voient mourir, de penſer qu’en quittant le monde, il ne perd pas l’eſpoir d’y renaître ! Une religion myſtique voudrait en vain ſubſiſtuer à cette eſpérance, celle des plaiſirs ſpirituels & d’une béatitude céleſte : les hommes préfèrent à ces idées