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l’île des femmes

valier, déjà gagné par une bonne joie calmante, sous un couvert de citronniers sauvages, au pied d’un rocher où s’ouvrait une petite grotte.

— Reste-là, dit Lydé ; je vais repasser le fleuve et ramener Lalagé qui doit se désespérer.

— Comment ! fit Dyonis, mais tu ne pourras pas franchir ce courant impétueux. Je vais ramer moi-même.

Lydé rit tranquillement :

— Non, dit-elle ; reste-là. Je viendrai t’y reprendre. Surtout, ne te montre pas.

D’un bond léger, elle disparut entre les feuilles.

Débordant d’allégresse, Dyonis se dit : « Je suis sauvé ! Ô monsieur mon père, ma bonne maman, mes frères, et toi vieux port d’où sont partis mes grands rêves d’aventure, je vous reverrai ! »

Je vous reverrai, donc je quitterai cette île. Ah ! ah ! comment ? Mais, déjà, un lien l’y retenait. Il ne s’en allait pas volontiers, même en pensée. Le chevalier resta pensif. Un silence d’âme se produisait en lui. Et le visage de Lydé, dans une fraîcheur d’aurore, c’était tout ce qu’il voyait au plus profond de lui-même. En s’écoutant, il entendait murmurer encore sur sa plus mélodique fibre, la délicieuse cantilène de la jeune amazone !

Après s’être rhabillé, tout ému et tout troublé, il ne pensa qu’au retour de la fille de Vénus. Pour lui, maintenant, le naufrage de La Centauresse semblait s’être produit dans un monde confus, lointain.