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l’île des femmes

Sur le pan de route qu’il apercevait de son observatoire, une de ces voitures anormales déjà vues de La Centauresse passa et disparut en vitesse. Voiture sans chevaux, bondissante, rapide avec une souple vélocité et dont la cadence était marquée par une sorte de halètement mécanique. Mais le chevalier ne s’étonna pas outre mesure. Son imagination étant déjà dépassée, il ne voyait plus de limites à l’extraordinaire. Il s’attendait à des surprises plus ahurissantes encore dans cette miraculeuse terre.

En ce moment, Dyonis s’étonnait surtout de ce qui se passait en lui-même. Livré à sa propre sauvegarde et aux périls d’une aventure inimaginable il sentait s’affirmer en lui avec force la volonté du courage et de l’audace. Il devenait subitement un homme. Après son naufrage, il eut peur d’avoir peur, peur d’être incapable de toute détermination virile. Assuré maintenant de ne pas manquer d’initiative ni de constance dans ses résolutions, le chevalier ne douta pas de revoir Marseille, après avoir heureusement traversé les péripéties de son incroyable odyssée.

Il se tailla d’abord un bâton, long comme une pique et l’épointa soigneusement. Ensuite, avec un lambeau de voile ramassé sur la grève, il confectionna un bissac, en utilisant les ficelles qui y appendaient. Ce sac, avant de partir, il l’emplirait d’oranges et de dattes, afin d’être muni de provisions de route. On ne sait jamais ce qui peut arri-