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l’île des femmes

maine. Ces diablesses à l’entrée du port, cette ville femme, ces longues limaces noires qui nous cernent et vomissent la foudre, tout cela indique trop que sont outrepassées les limites de la nature et de la simple humanité. J’en suis à me demander si tout ceci ne serait point qu’un songe maléfique, une étrange fantasmagorie.

Le lieutenant Tamarix tira de sa bouche la belle pipe hollandaise qu’il préférait :

— Dépaysés, surpris, ahuris nous le sommes tous, c’est certain. Mais quoi d’étonnant à cela ? Ce monde-ci ne ressemble pas au nôtre, j’en conviens. C’est un pays tout de même où il y a de la terre, des arbres, des hommes et des femmes, sans doute ; un pays trop civilisé pour qu’y règne la sauvagerie. Qui sait, nous y serons peut-être portés en triomphe. Peut-être aussi nous regardera-t-on comme des bêtes curieuses. Quoi qu’il en soit, on se tirera sains et saufs de cette aventure, à tout prendre rassurante, en dépit de certaines bizarreries qui dépassent notre judiciaire.

— Je le crois aussi ! certifia Dyonis de Saint-Clinal.

— Et moi, je répète, s’entêta Le Buric, que nous sommes sortis de la terre et que La Centauresse navigue dans l’autre monde. Qui sait, peut-être avons-nous fait naufrage et sommes-nous en route pour l’Enfer, que nous avons sans doute bien mérité les uns et les autres.

À ce moment, le capitaine Le Buric roula un