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l’île des femmes

port immense peuplé de vagues dansantes mais, autrement, presque désert. Quelques bateaux seulement, bas, casematés, métalliques convergeaient de loin vers la goélette. Des câbles de cuivre coupés court, pendaient au flanc de ces navires singuliers. Le chevalier et ses compagnons se demandaient en vain quelle pouvait être l’utilité de ces langues de métal, lorsque, de chacune d’elles, jaillit une fulguration bleuâtre, suivie d’un zigzag violent de foudre. Une masse d’eau haute comme une colline, se souleva à distance. La Centauresse, cependant, faillit chavirer.

Le capitaine Le Buric fit un bond en arrière, se signant et sacrant en même temps. Maître Pintarède, qui avait donné du flanc contre le mât d’artimon, se frottait les côtes, tandis que le P. Loumaigne, accroché des deux mains à une vergue basse, essayait de résister à ce mouvement d’eau intempestif. Le beau lieutenant Tamarix ne lissait plus sa barbe de jais. La bouche ouverte, il montrait de grosses dents brillamment émaillées, prêtes à mordre, comme les croces d’un fauve molesté. Quant au chevalier de Saint-Clinal, il venait bel et bien de sentir la venette sillonner son épiderme à contre-poil. Des matelots s’étaient serrés instinctivement autour de leurs chefs. Tous étaient ainsi que des moutons en angoisse du loup.

Alors, ses regards presque égarés, le capitaine Le Buric dit :

— J’ai été dans la Marine du Roi, officier bleu