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l’île des femmes

le Père Loumaigne se pénétrait surtout de ce qu’il entendait dire, ne manifestant ni surprise, ni contrariété. C’est d’un ton bonhomme qu’il dit :

— Il me semble que vous aussi n’êtes pas à l’abri des mouvements indisciplinés de la nature humaine. Votre île est en pleine révolution.

— C’est à mon tour, reprit le recteur, de dire : Hélas ! Toutefois, loin de favoriser les revendications des Masculines, ou même de traiter avec elles, nous les combattons énergiquement. Je voudrais, à ce sujet, m’expliquer au moyen d’une comparaison. On ente les arbres chez vous, n’est-ce pas ?…

— Parfaitement.

— Et souvent le plan sauvage pousse des surgeons qui étoufferaient et détruiraient l’espèce cultivée qu’il porte.

Le Père approuva d’un signe de tête, Alors, le savant vénusien reprit :

— La révolte des Masculines est la poussée de ces surgeons sauvages. Et comme un bon jardinier coupe impitoyablement ces rejets, nous élaguons toutes les reviviscences adventives de la nature primitive. La civilisation, ne l’oubliez pas, c’est le règne de l’artificiel, du voulu.

— Fort bien, répliqua le Père Jésuite. Toutefois l’homme n’est pas une plante. On peut réduire ses manifestations extérieures. Elles se reproduisent néanmoins avec plus de force en son âme.