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l’île des femmes

amazones devenues les maîtresses des artisans, au sens où l’on dit du seigneur qu’il est le maître, paraissaient moins méchantes et irascibles que les meneuses d’esclaves et femmes des hommes des cultures. On distribuait à cette heure le pain, les légumes, la viande et autres vivres tirées de grandes voitures couvertes, sans chevaux. Les criailleries, réclamations cessaient au passage des amazones et de leurs prisonniers, accueillis de groupe en groupe par ces épithètes :

Moechus ! Moechina !

Après la traversée d’une place entourée de magasins d’approvisionnement, la troupe traversa l’enclos des artistes, peintres, sculpteurs, orfèvres, bijoutiers, ébénistes d’art et autres artisans d’élite. Les ateliers étaient grands ouverts sur des parterres fleuris. Là aussi des femmes accouraient en soulevant leurs voiles, suivies par les artistes nonchalants, dont plusieurs fumaient de longues pipes de terre blanche. Dyonis remarqua que les femmes de cet endroit étaient plus aristocratiquement élégantes, plus finement belles que celles de la rue des métiers du bois. Les hommes y avaient aussi plus de noblesse dans le visage, spiritualisé par les regards. Les habitants de cet enclos regardaient passer Lydé et Dyonis avec curiosité, certes, mais sans malveillance ni injures. Leurs physionomies paisibles, embellies comme par un don intérieur exprimaient plus d’indulgence et de pitié que de réprobation.