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l’île des femmes

lanières des sandales se croisaient autour de leurs jambes fuselées. Dans son abondante chevelure dorée, Lydé aux belles tresses portait un corymbe de gloxinias, dont l’azur matinal répondait aux rayonnements de ses prunelles violettes. La brune Lalagé, elle, s’était ceinte d’une couronne d’hibiscus couleur de feu. Toutes les deux, parées de bracelets d’or, de colliers de perles pâles, de boucles d’oreilles longues, serties d’émeraudes et qui se terminaient par un minuscule grelot d’argent, aux tintins fins, à peine perceptibles. Ce grelottis menu sonnait cependant dans le cœur des deux Marseillais, comme les carillons joyeux de Pâques fleuries,

Tout en parant la barque, les petites déesses humaines entrevoyaient à la dérobée le ravissement muet des deux hommes des pays lointains. Et elles riaient, sur leurs dents étincelantes, un petit rire égrené et perlé de nymphes que les œgipans lutinent. Gaîté gazouillante comme celle d’un nid au Soleil !

Saint-Clinal et Tamarix voulaient ramer. Mais nautonnières belliqueuses n’y consentirent point. Lydé garda en mains les avirons d’ébène ; Lalagé resta au gouvernail.

— Asseyez-vous, Messieurs, dirent-elles avec une délicieuse impertinence, vos servantes vous promèneront dans les jardins d’eau de Fons Belli.

Depuis ce matin, elles aimaient répéter à la française ce mot de « Messieurs », appris la veille.