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l’île des femmes

rière une pente. Elles se hâtaient vers l’embarcadère pour préparer l’esquif. Leurs voiles transparents et colorés par le vert adouci de leurs tuniques, brodées de lotus jaunes, flottaient légèrement, comme les pensées qu’elles traduisaient, parfois, en paroles vives, rieuses, émues.

Lalagé disait :

— Le lieutenant Tamarix a voulu m’embrasser, hier soir, dans les rochers de Fons belli. Je désirais ce baiser. Pourtant je l’ai repoussé. Il m’a semblé qu’il y avait entre cet homme et moi une lame d’épée. Depuis l’île des lauriers-roses, je ne pense qu’à lui, en rêvant toutes sortes de songes. Mais je suis une amazone, une Vénusienne d’hier, et cela, malgré moi, me tient dans une sorte de malaise et de crainte.

— Moi, fit Lydé songeuse, rien qu’en prononçant ce doux nom : Dyonis ! je frissonne comme le feuillage de ces bambous sous la brise qui passe. En songeant qu’il sera bientôt auprès de moi, que j’entendrai sa voix chantante, que je verrai ses yeux si forts et si tendres, je tremble toute de joie.

— Mais, s’il te prenait dans ses bras, comme feront tes hommes plus tard, lorsque tu ne seras plus une amazone ?

Les yeux noyés de langueur, la gorge gonflée par un soupir, comme celle d’une tourterelle qui va roucouler, Lydé murmura d’une voix humide et chaude :

— S’il me prenait dans ses bras, je crois que je mourrais de bonheur. Je ne sais pas ce que je dé-