Page:Raymond Clauzel L'Ile des femmes 1922.djvu/137

Cette page n’a pas encore été corrigée
127
l’île des femmes

— Peu importent ces différences, reprit le Père Loumaigne, vous n’en êtes pas moins des légionnaires romaines.

— Oui, et tout cela nous a été évidemment caché ! répliqua la centuria. Pourquoi ?

Les amazones se regardaient, montrant toutes, de face ou de profil, l’admirable modelé de leurs visages militaires.

Relevant la tête, qu’une extrême perplexité faisait tenir baissée, la centurione demanda encore :

— Voudriez-vous, homme des pays lointains, nous dire quelques vers latins, par exemple de ce Virgile dont vous avez prononcé le nom avec tant de respect.

— Mais certainement…

Le Révérend Père se recueillit, puis scanda ces vers de l’Énéide, en se servant de la prononciation vénusienne :

 
Ducit Amazonidum lunatis agmina peltis
Penthesilea furens, mediisque in milibus ardet,
Aurea subnectens exsertæ cingula mammæ
Bellatrix, audetque viris concurrere virgo[1].

Les amazones parurent agitées. Et la centurione, maîtrisant un étonnement des plus vifs, expliqua au Père Loumaigne que les vers qu’il

  1. La belliqueuse Penthésilée, à la tête d’une troupe d’amazones aux boucliers en croissant de lune. Le sein à découvert soutenu par une ceinture d’or nouée, elle brille entre mille et, guerrière vierge, ose attaquer les hommes les plus intrépides.