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l’île des femmes

comment il pourrait entrer en conversation galante avec les irrésistibles beautés de l’Île.

Plus douce était la méditation du chevalier. Dans l’odeur mouillée du fleuve et des hautes fougères, aux écoutes de son cœur vierge que l’amour naissant préparait aux belles et ardentes floraisons de la vie, sa pensée était à la fois la vision, la musique, le parfum, le sentiment de Lydé. Il la voyait et la sentait en lui, lumineuse et douce, intimement accordée au rythme de toute son ardeur intérieure. Cette nativité merveilleuse mettait de l’aurore à flots dans le cœur du jeune homme, hier encore froid et obscur pour la femme. Des frémissements le saisissaient et qui eussent projeté dans une ivresse démonstrative sa jeunesse fougueuse, sans cette robe noire du Père Loumaigne qui effrayait ses enthousiastes velléités.

— Mais enfin, mon Père, demanda Tamarix en relevant la tête, que déduisez-vous de ce que nous savons déjà d’un pays tellement singulier ? J’avoue ne pouvoir me faire encore une idée saisissante de sa civilisation et de ses mœurs.

— Nous sommes évidemment, répondit le Révérend, dans une matrie, non dans une patrie. Les femmes règnent dans cette île. Comment ? Je ne le discerne pas exactement encore, bien que nous sachions déjà que les mâles y sont domestiqués, comme chez les antiques amazones, plusieurs siècles avant la guerre de Troie. Diodore de Sicile relate qu’aux temps fabuleux de la reine Myrina, les