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sans cesse leurs regards s’identifie avec leurs conceptions. Ils n’ont par-tout sous les yeux que la nature altérée sous mille rapports ou ensevelie sous des amas de chiffons. Nos vêtemens ont détruit toutes les formes du corps humain ; les causes perpétuées de race en race, ont naturalisé les défauts avec l’espèce. Il n’existe plus de modèles façonnés par la nature. Les peintres ou les sculpteurs qui en ont pu rencontrer quelques-uns, s’y sont fixés, et de là cette uniformité dans les figures qu’ils nous présentent. L’Albane n’a peint que sa femme et ses enfans ; il a mieux aimé donner souvent les mêmes traits, que copier ailleurs la nature sous des formes indignes d’elle. Les artistes anciens voyaient les modèles se multiplier sous leurs yeux, et par-tout ils retrouvaient les formes originelles. Aussi le beau des anciens, qui n’était que la nature elle-mme, n’est plus pour nous que le beau idéal, image vaine et changeante qui reçoit l’empreinte des goûts individuels et se moule sous le coin des préjugés.