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qui sait le découvrir par-tout où il est ; ainsi les arts, en formant le goût, mettent

    dans le son d’une pincette, que pour les apercevoir dans celui d’une corde de violoncelle. Pour qu’un son nous plaise, il faut qu’il se soutienne avec une intensité décroissante, c’est-à-dire, qu’il ne s’éteigne que par degrés ; il se développe mieux à l’oreille, elle a le tems de l’apprécier, de l’analyser ; cet amortissement graduel est celui qui s’accommode le mieux à notre manière de sentir. Notre une n’est pas faite pour recevoir des impressions d’un instant qui portent tout avec elles, et dont il faut apprécier sur-le-champ la totalité ; voilà pourquoi un son quelconque nous choque toujours, lorsqu’il est sec, qu’il finit aussitôt qu’il a commencé ; et le plus beau son finit par nous fatiguer, s’il est prolongé long- tems avec son intensité primitive, parce que, dès que nous l’avons apprécié, l’oreille est satisfaite et n’a plus rien à lui demander, ’ : à moins qu’une harmonie savante ne déploie pendant sa durée des richesses successives qu’elle en fait rejaillir, qui en détruisent alors la monotonie et le rendent toujours nouveau : semblables à ces fleurs variées qui s’élèvent par-dessus un vaste tapis de verdure et font par-tout avec lui un accord heureux de couleurs et une diversité enchanteresse. Je compare un son plein et moelleux qui déploie successivement les harmoniques qu’il engendre, à un assemblage de beaux objets qui se présentent d’abord à «ies yeux tous à la fois et qui défilent ensuite l’un