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toire que de prêcher toute la vie dans les chaires les plus considérables des meilleures villes du royaume.

« Il y a 57 ans, ajoutait-il, que je connais le métier de laboureur ; et depuis ce temps-là, je n’en ai jamais vu de si mal avisés, que de semer des terres sans les avoir bien fumées et bien labourées auparavant… Or, c’est par le moyen des écoles chrétiennes qu’on prépare les cœurs à recevoir la parole de Dieu dans les prédications.

« L’école, disait-il encore ailleurs, est le noviciat du christianisme. C’est le séminaire des séminaires. »

Enfin, de plus en plus préoccupé de cette pensée, il entreprit de fonder une association de prières pour obtenir de Dieu qu’il voulût bien accorder à la France des maîtres d’école chrétiens. Il était alors à Liancourt : beaucoup d’ecclésiastiques et de religieux que la guerre civile avait chassés de Paris, se trouvaient avec lui. Soixante-dix d’entre eux, parmi lesquels plusieurs membres de la communauté de Saint-Sulpice, entrèrent dans l’association qui fut placée sous le patronage de saint Joseph. Tous les associés s’engageaient à célébrer avec une grande dévotion la fête du Saint, à prier sans relâche pour que Dieu inspirât aux supérieurs ecclésiastiques le zèle des écoles chrétiennes, à y travailler eux-mêmes de tous leurs efforts, M. Bourdoise, de son côté, n’y manqua point. Il écrivit, prêcha, fit des conférences avec son ardeur accoutumée. Un jour, dans l’église de Gentilly, après un sermon, il parla avec tant de feu sur ce sujet, que quatre-vingts personnes voulurent aussitôt se faire inscrire dans l’association. Elle commença le 15 mars 1649 ; deux ans après, le 30 avril 1651, le vénérable de la Salle venait au monde. Dieu avait envoyé sur la terre le fondateur des écoles chrétiennes.

Nous n’avons pas le dessein de raconter, ici du moins, comment le vénérable de la Salle fonda son institut. Contentons-nous de rappeler qu’il l’établit en 1682 à Reims, au milieu d’obstacles de tous genres ; et qu’en 1688 il vint à Paris, appelé par M. de la Barmondière, curé de Saint-Sulpice, pour tenir une petite école de charité, ouverte rue Princesse, et placée jusque-là sous la direction d’un des prêtres de la communauté de Saint-Sulpice.

Quand le vénérable de la Salle vint s’établir à Paris en 1688, il se trouvait donc en face de deux communautés toutes deux puissantes et investies d’un monopole ; celles de maîtres d’école, et celle des maîtres écrivains ; or dans ce cercle privilégié, une première brèche avait été faite par les communautés des femmes enseignantes