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Quelle était la cause principale de l’infériorité des écoles au dix-septième siècle ? C’était l’insuffisance des maîtres. Les prêtres n’avaient pas le temps ; les laïques n’avaient pas la science, ni surtout la vertu nécessaire ; et les malheureux enfants étaient souvent livrés aux soins des premiers venus. Toute la surveillance et la sévérité de l’Église ne pouvaient empêcher les abus. A plusieurs reprises, des saints, des hommes de prière et de charité avaient essayé de fonder des instituts pour former des maîtres. L’œuvre, en France du moins, n’avait pas réussi. Celui qui devait la faire n’était pas venu.

Un des plus ardents propagateurs de la réforme ecclésiastique, à cette époque, M. Bourdoise, ami de saint Vincent de Paul, avait été frappé de l’urgence de cette réforme.

« Je souhaiterais, écrivait-il à M. Olier, voir une école dans un esprit surnaturel, dans laquelle, en apprenant aux enfants à lire et à écrire, on les pût disposer et former à être des bons paroissiens. Car de voir qu’une charité fasse une dépense pour leur faire apprendre à lire et à écrire seulement, et qu’ils ne deviennent pas meilleurs ni plus chrétiens, c’est dommage, et néanmoins c’est ce qui se pratique le plus communément ; et aujourd’hui toutes sortes d’enfants vont aux écoles, mais à des écoles qu’on leur fait toutes naturelles ; ainsi, il ne faut pas s’étonner si, dans la suite, on en voit peu qui vivent chrétiennement, parce que, pour faire une école qui soit utile au christianisme, il faudrait avoir des maîtres qui travaillassent à cet emploi en parfaits chrétiens, et non pas en mercenaires, regardant cet office comme un chétif métier, inventé pour avoir du pain…

« Pour moi, je le dis du meilleur de mon cœur, je mendierais là volontiers de porte en porte pour faire subsister un vrai maître d’école, et je demanderais, comme saint François Xavier, à toutes les universités du royaume, des hommes qui voulussent non pas aller au Japon ou dans les Indes prêcher les infidèles, mais du moins commencer une si bonne œuvre.

« Il est facile de trouver dans le clergé des gens disposés à prendre des vicariats et des cures, mais de rencontrer des personnes qui aient la piété et les qualités nécessaires pour tenir une école et remplir dignement cet emploi, qui aient du pain d’ailleurs, et qui veuillent s’en acquitter avec une entière dépendance de MM. les curés, c’est chose fort rare. D’où je conclus que, de s’employer à former de tels maîtres ; c’est une œuvre sans doute plus utile à l’Église et plus méri-