Page:Ravelet, Les petites écoles et le vénérable de La Salle au XVIIe siècle à Paris - 1872.pdf/18

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est dans l’indigence s’imposera les plus dures privations pour faire donner un peu d’instruction à son fils et trouvera le moyen de payer les mois d’écolage. S’il y a une école gratuite, il s’empressera de l’y envoyer et aura tous les droits pour l’y faire recevoir. Le maître de l’école payante sera privé de ce petit revenu. Ceux-ci se plaignaient donc, assiégeaient de leurs réclamations le grand-chantre, et piquaient son amour-propre pour qu’il exerçât le plus rigoureux contrôle sur les écoles de charité. La surveillance touchait à la persécution. Les curés essayèrent de s’y soustraire. Le curé de Saint-Paul institua, en 1654, cinq écoles de charité dans sa paroisse, en réservant à la compagnie de charité le droit de choisir et d’examiner les maîtres. Les curés de Saint-Leu, de Saint-Louis, de Saint-Étienne, suivirent cet exemple. Le grand-chantre qui s’appelait alors M. Le Masle, y forma opposition et offrit de faire enseigner gratuitement les pauvres dans les écoles ordinaires. Les curés répondirent que les parents riches cesseraient alors d’y envoyer leurs enfants, ou que les enfants pauvres seraient mis à part, négligés, et peu à peu renvoyés. Le conflit s’envenima. L’intérêt privé des maîtres des écoles payantes apparaissait derrière les motifs allégués par le grand-chantre.

Ainsi, l’un d’eux, Nicolas Mariette, poursuivit le curé de Saint-Louis en l’Ile, et le traduisit devant le chantre pour lui faire fermer l’école de charité qu’il avait ouvert en sa paroisse. Le chantre condamna le curé. Celui-ci en appela au Parlement et obtint un arrêt, interlocutoire qui permettait « aux prêtres préposés par les curés des paroisses et aux femmes de continuer à instruire, à la charge de ne montrer qu’aux enfants des pauvres et par charité[1]. » Le même droit avait été reconnu à plusieurs communautés de femmes, aux Filles de la Croix[2], aux Filles de la Charité[3], aux Ursulines[4]. La jurisprudence du Parlement se fixait dans ce sens[5]. Le chantre cependant continuait de faire valoir son droit, il était soutenu par le chapitre. Les curés de Paris avaient pris fait et cause les uns pour les autres, de nombreux mémoires avaient été échangés. L’archevêque évoqua l’affaire. Les partis consentirent à se soumettre à sa décision ; et il rendit, le 20 septembre 1684, une sentence qui reconnaissait en

  1. Arrêt du Parlement du 25 mai 1666.
  2. Arrêt du 3 mars 1651.
  3. Lettres données par le cardinal de Retz aux Filles de la Charité.
  4. Arrêt du 23 août 1678.
  5. Arrêt du 2 septembre 1679.