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ACTE I.

deur de Stelheim & lui, tirer des lapins dans le parc. Je crois qu’ils ne tarderont pas à revenir.

La Comtesse.

Quelle imprudence ! A peine encore convaleſcent : les matinées font ſi fraîches ! Je ne ſais : mais je ſuis menacée de quelque choſe d’affligeant. Je vois tout en noir.

Lisbeth.

Ah, Madame ! c’eſt que vous avez paſſé une mauvaiſe nuit. Je ſuis comme vous : quand j’ai mal dormi, je ſuis toute la journée dans l’inquiétude ; j’ai peur de caſſer quelque choſe, ou d’avoir le malheur de vous fâcher contre moi. Mais il ne faut pas croire à toutes ces folies-là.

(Elle s’éloigne.)

La Comtesse.

Ah, Stelheim, tu ménages bien peu une vie que tu dois à mes tendres ſoins ! Que de larmes tu m’as coûtées, & qu’il m’en reſte encore à répandre ! Mon ame eſt oppreſſée ; je ſouffre réellement… Malheur à l’être ſenſible : s’il jouit de l’avenir, il eſt plus ſouvent encore affligé d’avance des maux qui n’exiſteroient pour d’autres que long-temps après.