Page:Ratton - Les œuvres post-scolaires, éducation populaire et sociale, 1905.pdf/28

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 25 —

accouraient pour applaudir un orateur célèbre.

Le goût de ces manifestations s’était répandu si vivement dans le peuple, que les grandes villes de province attiraient les rhéteurs romains. Il était de mode d’assister à ces séances littéraires, qui se donnaient d’ordinaire les jours de foire ou de marché et toujours l’après-midi. La claque y faisait déjà fureur à cette époque reculée.

Le conférencier n’avait garde d’oublier de se rendre compte par lui-même des qualités d’acoustique de la salle et des invitations officielles qui étaient toujours adressées aux notables de la ville. L’heure venue, l’orateur partait lui-même pour recevoir son monde, et il distribuait les bonnes places aux gens influents de l’endroit. Il faut noter, ici, un détail absolument curieux, c’est que le public qui suivait ces conférences exigeait que le sujet en fût, chaque fois, improvisé.

Cette condition originale n’était point, cependant, pour inquiéter trop les rhéteurs. Ceux-ci mettaient, au contraire, tous leurs soins à obtenir une diction parfaite, animée de gestes et de jeux de physionomie extrêmement expressifs. Et, cependant, leurs discours plaisaient énormément, à tel point que la profession de conférencier devint réellement lucrative.

Un richissime citoyen de la République avait donné, un jour, une valeur de 100 000 francs pour entendre une seule fois le philosophe Aristide ; un roi du Bosphore offrait à Polémon 60 000 francs pour une conférence ; Héraclide avait fait l’acquisition d’une superbe propriété