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impression, d’une émotion produite par l’œuvre d’art pour faire jaillir du plus profond de notre être cette faculté de la sensation artistique, clarté radieuse qui vient illuminer l’esprit et sans laquelle la vie est vraiment trop terne et par trop monotone.

Avant donc que d’en venir à convier le peuple à se familiariser avec les chefs-d’œuvre artistiques, il nous paraît plutôt nécessaire de le préparer utilement et progressivement à de telles délicates jouissances. Laissons-le, pour l’instant, dans le milieu où les hasards de la fortune l’ont placé, et apprenons-lui à connaître vraiment cette belle Nature, au sein de laquelle il vit son existence laborieuse et obscure ; cette incomparable Nature qu’il ignore et que nous avons le devoir de lui révéler dans ses manifestations imposantes et pittoresques.

Ceux d’entre nous qui ont pu goûter plusieurs fois le rare plaisir d’une des magistrales symphonies de Beethoven peuvent dire avoir été sous le charme captivant de cette divine harmonie qui préside à l’enchaînement mélodique des différentes parties de l’œuvre. C’est un intraduisible enchantement pour l’oreille, et en même temps que l’âme en tressaille, l’esprit suit sans effort le majestueux développement de l’idée en ces thèmes variés d’expression suprahumaine, que le génie du maître a rendus immortels.

Eh bien, la Nature peut, elle aussi, nous faire éprouver de pareilles sensations. Il suffit seulement de la regarder et de la comprendre. Nos yeux seront ravis du spectacle, et pour quelque peu