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TROIS PARMI LES AUTRES

« Tout de même, j’ai le cafard. Je n’étais pas amoureux de mon amie Grâce. Je suis amoureux de la petite bachelière qui me fait damner. Mais pourquoi s’est-elle mariée ? Fini, le massage japonais ; finie, F odeur de ses mains pures. Je sens au cœur un vide étrange.

Pourquoi ne peut-on conserver
Les jeunes filles comme les immortelles ?

Même une fois desséchées, elles seraient encore belles.

On en ferait des couronnes

Pour les jeunes gens morts prématurément.

Polygone aimé des Dieux
Que n’as-tu cette couronne
De blancs visages tressés
Où Grâce embaumée rayonne ?
On l’aurait mise sur ma tombe
Et moi l’on m’aurait mis dessous.
Vous sur ma tombe, ô mes amies,

De vos sourires apprivoisant les hargneuses pensées,

Bouledogues du Cimetière,

Et moi dessous, noyé léger dans l’onde lourde de la terre.

Vous sur ma tombe et moi dessous,
Ô jeunes filles, ô mes belles amies,
Nous aurions regretté la vie
Ensemble éternellement (bis).

« Ce qui m’est le plus amer, c’est que la Grâce qui nichait sa tête dans des versets d’amour coranique brodés en fils d’argent sur soie rose ait épousé un mâle d’une bonne laideur commerciale, modèle courant. Je crois même qu’il a un peu de ventre. Sais-tu qu’elle a l’air de l’aimer ?

« Cela me rappelle un mot de toi, cette après-