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XIX


Elles déjeunaient ensemble, pour la dernière fois, dans la longue salle à manger au dallage blanc et noir. Pendant les intervalles de silence, on entendait le déclanchement régulier du battant de l’horloge qui semblait faire un effort pénible à chaque extrémité de sa course et le répétait indéfiniment.

Tout à l’heure, les voitures seraient là. Suzon riait et jacassait, plus que jamais heureuse de vivre. Les deux autres, silencieuses, avalaient de minuscules bouchées en buvant de grands verres d’eau.

— Le facteur ! s’écria Suzon en regardant dans la cour. Savoir s’il y aura encore des lettres pour nous…

Il n’y avait qu’une lettre pour Antoinette : en reconnaissant l’écriture, la jeune fille leva les sourcils avec une expression d’ironique étonnement.

— Vous permettez ? On ne doit pas faire attendre les miracles… Elle fendait l’enveloppe.

— Il n’y en a pas long, remarqua Suzon.

Antoinette, qui avait déjà parcouru les feuillets, regarda Annonciade par-dessus la table :

— C’est de mon père. Il me fait part de son mariage avec Olga.

— Non ! Ce n’est pas possible !