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TROIS PARMI LES AUTRES

hommes ses frères… Compagnons de voyage, compagnons de naufrage…

Mon Dieu ! Comme elle aurait voulu, avec celui-là, faire l’essai d’une fraternité plus dangereuse, traverser l’épreuve qui disjoint ou qui soude les êtres, résister aux embûches, maintenir à force de volonté, à force d’amour, malgré l’amour, leurs âmes l’une contre l’autre.

— Comme vous êtes pâle, Antoinette… Qu’est-ce que vous avez ?

— J’ai un peu froid, dit Antoinette dont les dents s’entre-choquent.

— Voulez-vous rentrer ?

— Non, non, je vais mettre un manteau.

— Ne bougez pas, je vais vous le chercher.

— Dans ma chambre, la deuxième porte à droite qui donne dans la salle à manger, vous trouverez un manteau blanc, pendu.

En quelques bonds, il est de retour, un peu ému d’avoir respiré dans la chambre d’Antoinette un parfum de violette fraîche, d’avoir vu ses livres, ses vêtements, la photographie d’une jeune femme habillée à la mode d’il y a quinze ans et qui lui ressemble et, à côté, la photographie d’Annonciade.

— Ça va mieux ?

— Ça va très bien, je vous remercie. Le manteau dont il l’a enveloppée lui réchauffe le cœur. Qu’elles sont précieuses, ces minutes qui lui sont données…

— Parlez-moi de vous, Antoinette. Il y a bien longtemps que nous n’avons causé, il me semble ?

Antoinette pense : « Je vous remercie de me