riant, voulez-vous nous faire croire que vous n’aimez ni le plaisir, ni la vie, ni l’amour ?
Antoinette réfléchissait, la tête penchée, s’efforçant de voir clair en elle-même.
— J’aime la joie, répondit-elle — et presque tous les plaisirs me blessent. J’adore la vie — et j’en vois les cruautés comme si j’avais une loupe dans l’œil. Quant à l’amour, ah ! que je le hais ! Et pourtant…
— Et pourtant ?
— Rien, dit Antoinette en regardant attentivement les petites plantes cramponnées à la terre sèche.
— Où vont-ils en venir ? se demandait Annonciade avec angoisse.
Robert passa son bras sous le bras d’Antoinette et le maintint ferme. Elle ne lui échapperait pas.
— Peut-on savoir pourquoi vous haïssez l’amour. Que vous a-t-il fait ?
— À moi ? Rien. Enfin… presque rien. Mais vous savez bien que l’amour est le plus grand ennemi des femmes.
— C’est la première fois que j’entends une femme me dire ça.
— Naturellement. Les soldats ne vont pas raconter devant l’ennemi qu’ils détestent la guerre. D’ailleurs, la plupart l’aiment…
— Faut-il comprendre que vous prenez le parti des déserteurs ?
— Je ne suis pas lâche, dit sourdement Antoinette. Je me ferai tuer s’il le faut, mais auparavant j’aurai craché à la figure du général.
Robert sentit trembler de passion le bras qu’il