elle vit Annonciade debout derrière elle, l’air incertain :
— Toine…
— Eh bien ?
— Tu es fâchée ?
— Non, répondit Antoinette amèrement. Je suis ravie. Toi aussi, sans doute. Tout est pour le mieux.
Elle disparut dans sa chambre où elle s’enferma à clef, laissant la petite immobile, le cœur lourd.
Quelques minutes plus tard, on frappa à la porte d’Antoinette. Elle releva la tête, les yeux illuminés. Déjà elle regrettait son mouvement de tout à l’heure. Ah ! qu’elles s’expliquent une bonne fois, qu’elles sortent de ce cercle infernal, quitte à briser tout ce qui fut leur amitié — et ensuite, on verra ce qu’on peut faire avec les morceaux…
— C’est toi ? demanda-t-elle doucement.
— Oui, c’est moi, répondit la voix de Suzon. Je peux entrer ?
— Un instant, veux-tu ?
Cette nouvelle chute dans le noir lui donnait le vertige.
Quand Suzon entra, son regard avide ne trouva qu’un teint poudré de frais, des yeux un peu trop brillants — mais était-ce bien d’avoir pleuré ? — une impassibilité de Commanche au poteau de torture.
— Dis donc, tu ne crois pas qu’Annonciade perd un peu la tête ? Qu’est-ce qui lui a pris, tout à l’heure ? Elle qui ne jurait que par toi…
— Les dieux changent, répondit Antoinette