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TROIS PARMI LES AUTRES

bon sens, Antoinette se sentait accablée. Elle demeurait inerte, le dos appuyé à la balustrade, les mains abandonnées, les paupières basses, comme une coupable.

— Eh bien, triompha André, me prenez-vous toujours pour un imbécile ?

Le regard clair et sérieux se posa sur ses yeux à lui où se mêlaient le défi, la malveillance et la crainte. Antoinette secoua la tête et dit simplement ces mots, qui tombèrent sur le cœur d’André comme une suprême injure :

— Mon pauvre ami…

— Je n’ai pas besoin de pitié, gronda-t-il les dents serrées. Allez chercher vos pauvres ailleurs.

Bertrand et Suzon débouchaient, essoufflés d’avoir gravi la rampe :

— Eh bien, où sont les autres ?

— Vous les avez jetés par-dessus bord ?

— Envolés, répondit Antoinette en s’efforçant de rire. Nous nous sommes retournés, ils n’y étaient plus.

— Ah ! les petits coquins ! s’écria Bertrand. C’est du joli !

Cependant, d’un coup d’œil, les arrivants avaient noté l’expression insolite d’André et la pâleur d’Antoinette.

— Drame, pensa Suzon.

Et elle se chantait à elle-même en marchant :

Drame, drame, drame
comme on chante :
Ran-plan-plan.