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LA MAISON DES BORIES

— Eh bien ? dit Isabelle en levant les sourcils.

Laurent rougit, serra les poings et prononça avec effort :

— Bonjour, monsieur. Avez-vous bien dormi ?

— Très bien, très bien, merci beaucoup, murmura le jeune homme.

Il avait rougi aussi et semblait perdu. Un silence gêné régna.

— Il ne faut pas m’appeler monsieur, dit-il enfin d’une voix gutturale et plaintive, en jetant au petit garçon un regard affamé de sympathie. Je m’appelle Carl-Stéphane.

Laurent parut surpris, indécis. Son regard s’humanisait.

— Moi, je m’appelle Laurent Durras, répliqua-t-il avec autant de fierté que s’il disait : « Je suis l’empereur de Chine. »

Il allait sortir de la pièce, sur cette superbe déclaration. Mais avant de franchir le seuil, il se retourna, comme poussé par le besoin tardif de répondre à l’amabilité de l’étranger.

— Si vous voulez, dit-il, je vous ferai voir mon lapin. Il boit de la bière comme un homme chic, et il fait la course en ligne droite avec moi et le chien et prend le départ au coup de sifflet.

— Très intéressant, approuva la voix gutturale. J’irai voir cela, donc.

Resté seul avec Isabelle, Carl-Stéphane se mit à rire. Auprès d’elle, il n’éprouvait aucune gêne, il se sentait libre, épanoui et confiant.

— Un jeune typhon domestique, votre fils, je crois, madame ?

— E-xac-tement, répliqua-t-elle, moitié riant, moitié soupirant, et le regardant, lui sembla-t-il, avec un intérêt nouveau.

C’est alors qu’il remarqua la forme de ses paupières.

Un moment après, il sortit dans la cour. M. Durras