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pauvres des relations nouvelles, de faire valoir leur expérience et leurs attentes propres et d'accéder ainsi effectivement à leur reconnaissance comme des êtres humains ayant des capacités à cultiver, des réflexions à partager et des responsabilités à exercer.

174. C'est dans cette perspective que le Sommet mondial pour le développement social de Copenhague a affirmé la nécessité absolue de trouver un nouvel équilibre entre le développement économique le développement social et le développement culturel, soulignant combien les besoins humains fondamentaux sont étroitement liés et concernent des domaines aussi variés que la santé, l'eau, l'éducation, l'emploi, le logement et la participation à la vie culturelle et sociale.

C. Critères pour une définition juridique de l'extrême pauvreté

175. Les éléments d'analyse des conditions de vie dans la misère et leur impact sur l'ensemble des droits de l'homme auxquels il a été fait référence mettent en évidence une série d'éléments essentiels à prendre dûment en considération dans toute approche juridique de l'extrême pauvreté.

176. Tout d'abord, la misère est la négation non d'un droit en particulier ou d'une catégorie de droits mais de l'ensemble des droits de l'homme. L'analyse qui précède montre jusqu'à quel point elle constitue une atteinte non seulement aux droits économiques et sociaux, comme on le suppose généralement dans une perspective économique, mais aussi et dans la même mesure, aux droits civils, politiques et culturels, et, de surcroît un outrage au droit au développement. De ce point de vue, l'extrême pauvreté témoigne de manière tout à fait particulière de l'indivisibilité et de l'interdépendance des droits de l'homme.

177. L'analyse effectuée sur les conditions de vie dans la misère souligne qu'il s'agit d'un processus cumulatif de précarités qui s'enchaînent et se renforcent mutuellement : mauvaises conditions de vie, habitat insalubre, chômage, mauvais état de santé, absence de formation, marginalisation, etc. Il convient, par conséquent, de parler d'un véritable "cercle vicieux horizontal" de la misère, selon les propres paroles des intéressés.

178. Cela soulève deux questions qu'à aucun moment il ne faut perdre de vue. La première, d'ordre juridique, est qu'il s'agit fondamentalement non pas d'un problème de "reconnaissance" mais "d'exercice" réel et effectif, par les personnes extrêmement pauvres, de l'ensemble des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La deuxième, celle de l'indivisibilité et, surtout, de l'interdépendance des droits de l'homme, permet de voir jusqu'à quel point, dans un enchaînement négatif tel que celui qui est décrit, la privation d'un droit peut avoir des répercussions négatives sur l'exercice des autres. Il apparaît que le fait de rétablir un droit ne suffit pas à lui seul à assurer à celui qui vit dans l'extrême pauvreté le plein exercice de tous ses droits.

179. Autre aspect du phénomène, également pervers, est sa tendance marquée à se perpétuer du fait qu'il se transmet de génération en génération. En témoignent les multiples recherches portant sur de nombreuses périodes de l'histoire et les différentes monographies relatant la vie d'une même famille