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variables macro-économiques telles que le déficit budgétaire, la balance des paiements, l'inflation, etc.

88. Les mesures visées ci-dessus ont pour caractéristique commune de tendre à réduire le déficit budgétaire et à ouvrir l'économie. Le premier grand objectif (résorber le déficit budgétaire) est de faire en sorte que les pays débiteurs réalisent un excédent commercial qui leur permette de continuer à assurer le service de la dette extérieure. Le deuxième objectif (ouverture de l'économie) tend à ce que les paiements puissent être réalisés sans affecter les courants d'exportation des pays industriels (Voir Juan C. Sánchez Arnau, "Recesión, ajuste estructural y pobreza rural en America latina", document présenté à la FAO.). Enfin, la stabilité monétaire est la garantie que les recettes fiscales, converties en dollars, permettent de faire face aux règlements extérieurs.

89. Les critiques sévères qu'ont suscité les conditions ainsi imposées de l'extérieur aux politiques économiques nationales ont été avivées par le coût social qui a accompagné ces programmes d'ajustement structurel dans la plupart des pays en développement dans lesquels ils ont été appliqués. Cela apparaît tant dans les études qu'ont effectuées les organismes des Nations Unies qui s'occupent des questions sociales et des droits de l'homme que dans les nombreuses résolutions qu'ils ont adoptées à ce sujet (Voir, entre autres, le rapport final établi par M. Danilo Turk, Rapporteur spécial, sur la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels (E/CN.4/Sub.2/1992/16), les différents rapports du Groupe de travail sur le droit au développement et ceux du Secrétaire général, en particulier celui qui est intitulé "Ensemble préliminaire de principes directeurs de base sur les programmes d'ajustement structurel et les droits économiques, sociaux et culturels" (E/CN.4/Sub.2/1990/10) et celui qui porte la cote E/CN.4/1995/25. Il convient également de rappeler le rapport de 1989 de l'UNICEF intitulé "L'ajustement à visage humain" qui est toujours d'actualité. Parmi les multiples résolutions qui se rapportent à la question, il y a lieu de mentionner les résolutions 1991/27, 1992/29 et 1994/37 de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités ainsi que la résolution 1993/14 de la Commission des droits de l'homme.). Il convient de mentionner parmi les multiples objections qui sont formulées, entre autres, celles qui suivent : il s'agit d'un réel obstacle à l'exercice du droit au développement; la charge de l'ajustement n'est pas équitablement répartie et retombe normalement sur les secteurs à faible revenu, creusant ainsi les disparités; les palliatifs prévus pour en atténuer les effets négatifs sont insuffisants ou inadaptés. Mais les critiques qui reviennent le plus souvent sont celles qui mettent l'accent sur l'effet négatif des ajustements structurels sur la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels.

90. A en juger, toutefois, par ses rapports, la Banque a apporté, ces dernières années, des innovations intéressantes tant dans l'affectation des ressources, faisant du social une de ses priorités, que dans sa façon de travailler, multipliant les contacts avec les organisations non gouvernementales. Pour mieux rendre compte de cette évolution, nous préférons reproduire tels quels les propos tenus par les autorités de la Banque à ce sujet, propos parus dans sa publication intitulée "Les leçons du passé, les enjeux de l'avenir", à savoir : "Au cours des années, les enjeux se sont modifiés. Le Groupe de la Banque a tiré les leçons de l'expérience, ce qui l'a conduite à infléchir son approche en matière de développement". "Alors qu'on pensait initialement que la croissance finirait, par osmose, par avoir des retombées sur les pauvres, on a maintenant réalisé que, pour faire reculer la pauvreté, il faut aussi prendre des mesures en faveur des groupes les plus démunis et les plus vulnérables".

91. Du fait de cette orientation qui est encourageante, la Banque mondiale est actuellement l'une des principales sources d'investissement dans des secteurs tels que l'éducation, la santé, la planification de la famille, l'environnement, dans les pays en développement. En effet, ayant compris que ce type d'investissement dans le capital humain est indispensable pour réaliser la croissance, elle a augmenté le volume de ses prêts qui sont passés de 5 % de leur montant total au début des années 80 à plus de 17 % en 1994 (Selon le rapport annuel 1995 de la Banque mondiale, les prêts de la Banque aux secteurs de l'éducation ont dépassé 2 milliards de dollars pour chacun des trois derniers exercices. En outre, au cours de l'exercice 1994, les 25 % du total des prêts d'investissement de la Banque ont été directement ciblés sur les pauvres. Dans le document A/CONF.157/PC/61/Add.19 préparé par la Banque mondiale lors de la Conférence de Vienne, celle-ci signalait déjà que près de la moitié des opérations de la Banque ont une composante liée à la levée des obstacles à la participation économique de la femme.). A Copenhague, au Sommet mondial, elle a annoncé son intention de majorer de 50 % sa contribution au secteur social durant les trois prochaines