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traditionnellement la méthode du "seuil" ou de "la ligne de pauvreté", on utilise depuis peu, à titre complémentaire, la méthode des besoins essentiels non satisfaits. Les résultats en ce qui concerne l'écart entre les pourcentages sont réellement surprenants : alors que la Banque mondiale arrive pour toute la région à un taux de 25 % pour 1990, la CEPALC obtient, en se fondant sur la ligne de pauvreté, un taux de 45,9 % en 1992. De son côté, le Programme régional pour l'élimination de la pauvreté (PNUD), appliquant la méthode dite de "la mesure intégrée de la pauvreté", parvient à un taux de 61,8 %, soit un chiffre supérieur de 36,6 % aux estimations de la Banque mondiale. Ces résultats reflètent les disparités énormes que peuvent engendrer les différentes variantes méthodologiques pour la mesure de la pauvreté.

52. Il est intéressant de voir également ce qui se pratique dans d'autres organes de l'ONU. Une distinction est faite, dans le rapport sur la situation sociale dans le monde, entre les personnes qui sont pauvres et celles qui sont très pauvres. Une personne peut être considérée comme pauvre "lorsque la somme de ses revenus - provenant de la terre, de son capital ou de son travail - ne lui permet pas d'avoir un régime nutritionnellement adéquat et de satisfaire ses besoins essentiels non alimentaires".

53. Ainsi, la Commission de la science et de la technique au service du développement a créé en 1993 un groupe d'étude qui s'est donné pour tâche d'examiner le rôle de la technologie dans la satisfaction des besoins essentiels et de réfléchir aux nouvelles démarches scientifiques pouvant venir en aide sur ce plan aux populations à faible revenu. Le groupe d'étude a défini les besoins essentiels comme étant les éléments minimaux nécessaires pour entretenir la vie chez tous les humains sans exception, c'est-à-dire une alimentation suffisante et appropriée, des soins de santé et des services de distribution d'eau et d'assainissement, mais aussi l'accès à l'éducation et l'information pour que les individus et les collectivités puissent participer à des activités productives et exploiter de manière rationnelle les biens et services de base qui sont à leur disposition.

54. Comme on le constate, la tendance actuelle en matière d'indicateurs est plutôt axée sur la notion de besoins essentiels entendus dans un sens plus large que les besoins alimentaires. Cette tendance était également présente au Sommet de Copenhague qui a insisté sur le fait que la satisfaction des besoins humains fondamentaux est un élément décisif pour la réduction de la pauvreté et pour la réalisation d'un véritable développement social et plus encore sur le fait que "ces besoins sont étroitement liés les uns aux autres et concernent la nutrition, la santé, l'eau et l'assainissement, l'éducation, l'emploi, le logement et la participation à la vie culturelle et sociale" (par. 35 b) du Programme d'action).

55. Ce sont essentiellement ces critères qui ont été utilisés par le Sommet mondial pour cerner l'extrême pauvreté qu'il a aussi appelée "pauvreté absolue" et qu'il a caractérisée comme un état de "privation aiguë en ce qui concerne les besoins fondamentaux de l'être humain : nourriture, eau salubre, installations hygiéniques, santé, abri, éducation et information", en notant qu'elle "dépend non seulement du revenu mais aussi de l'accès aux services sociaux" (par. 19 du Programme d'action). Plus précisément, il a demandé d'élaborer des méthodes permettant de mesurer toutes les formes de pauvreté, en particulier la pauvreté absolue" (par. 25 du Programme d'action), et d'une