Page:Rapport final sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté, présenté par le Rapporteur spécial, M. Leandro Despouy.djvu/12

Cette page n’a pas encore été corrigée

insuffisant, qui courent le plus grand risque de devenir la prochaine génération de pauvres."

2. Ampleur et aggravation du phénomène

39. Fait révélateur d'une prise de conscience croissante de l'aggravation du phénomène de la pauvreté dans le monde, l'Assemblée générale, dans ses résolutions successives intitulées "Droits de l'homme et extrême pauvreté" (Voir annexe I.), s'est déclarée, dans les mêmes termes que la Commission des droits de l'homme, "profondément préoccupée par le fait que l'extrême pauvreté continue de s'étendre dans tous les pays du monde, quelle que soit leur situation économique, sociale et culturelle, et qu'elle a des effets graves sur les individus, les familles et les groupes les plus vulnérables et les plus désavantagés, compromettant l'exercice de leurs droits et de leurs libertés fondamentales".

40. Au-delà de la différence de degré de développement des pays, l'OMS constate qu'il existe un phénomène commun à tous les pays : l'aggravation de la pauvreté des groupes et communautés défavorisés, notamment dans les bas quartiers des grandes villes, que ce soit dans les pays développés ou dans les pays en développement. Il existe un fossé non seulement entre les riches et les pauvres, mais également entre les pauvres et les plus pauvres de tous, non seulement entre les régions et les pays, mais aussi entre les populations d'un même pays. Une sous-classe défavorisée existe dans chaque pays, mais aussi dans chaque ville.

41. Le Département du développement économique et social, dans son Rapport sur la situation sociale dans le monde - 1993 (ST/ESA/235-E/1993/50/Rev.1.), signale qu'au cours des 10 dernières années, la pauvreté s'est aggravée en Afrique et en Amérique latine aussi bien en chiffres absolus qu'en termes relatifs. En Amérique latine, les progrès que les années d'expansion rapide avaient permis d'accomplir dans la lutte contre la pauvreté, pendant les années 70, ont été réduits à néant pendant les années 80. Au début de la décennie, on estimait qu'il y avait dans la région 35 % des ménages qui vivaient dans la pauvreté, contre 40 % en 1970; à la fin de la décennie, c'est-à-dire en 1989, 37 % des ménages et 44 % de la population totale vivaient dans la misère.

42. L'urbanisation galopante et non planifiée est autant la cause que l'effet de l'aggravation de la pauvreté : "A mesure que le monde s'urbanise, la pauvreté s'urbanise elle aussi. Déjà aux Etats-Unis, en Europe, en Amérique latine, la ville est devenue un haut lieu d'une pauvreté extrême. Dans les pays en développement, elle permet de moins en moins d'échapper à la misère, surtout en l'absence de services sociaux. Elle devient même le lieu d'une pauvreté spécifique, où les plus faibles sont plus vulnérables encore que partout ailleurs, victimes toutes désignées de la prostitution, de la criminalité organisée ou non, de la violence, y compris celle des forces de sécurité. Enfants dans la rue, enfants esclaves vendus au plus offrant, femmes seules surchargées d'enfants, vieillards sans ressources vivent souvent plus mal aujourd'hui dans ces immenses villes et bidonvilles que dans les campagnes dont ils ont fui la misère. En 1980, seulement un tiers des habitants des pays en développement étaient urbanisés. Aujourd'hui, la moitié de la population mondiale vit déjà dans les villes" (Revue française "Les enfants du monde", No 128,