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Mangeront dans un mets le cens du chevalier !
Voilà par quel chemin, pauvres, criblés de dettes,
Ils arrivent au pain dont vivent les athlètes.
Il est donc important, pour juger de tels frais,
De connaître avant tout celui qui les a faits.
Honteux chez Rutilus, chez Bassus honorables,
Ils sont, d’après le cens, ou permis ou blâmables.
Gurgès sait de combien les cimes de l’Atlas
Surpassent en hauteur les monts de ces climats.
Qu’importe, s’il ne peut d’un coffre-fort immense
Avec un petit sac faire la différence ?
Le Gnôthi seauton est descendu des cieux.
Grave le dans ton cœur cet oracle des dieux.
Soit que par les liens d’un heureux hyménée,
Tu cherches à fixer enfin ta destinée,
Soit que l’ambition d’être utile à l’état.
Te fasse désirer une place au sénat ;
(Thersite, s’épargnant un combat inutile,
N'osa pas demander le bouclier d’Achille,
Ce bouclier pesant, ouvrage de Vulcain,
Qu'Ulysse ne portait que d’un bras incertain.)
Et si, pour un procès d’une grande importance,
Des luttes du barreau tu veux courir la chance,
Avant que d’affronter ces orageux débats,
Consulte tes moyens : demande toi tout bas
Si le ciel t'a doué du talent oratoire,
Ou si, comme Mathon, tu n’es qu’une mâchoire ;
Prends ta mesure en tout. Il te faut du poisson,
Et tu n’as que l’argent qu’il faut pour un goujon ;
Laisse le surmulet. Si de ta gourmandise
Les besoins vont croissant, quand ta bourse s’épuise :
Si tu veux, dévorant ton patrimoine entier,
Digérer en un jour argent et mobilier.
N’épargner ni troupeaux, ni bois, ni métairie,
Quelle sera la fin de ta gloutonnerie ?