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Le bruit, de Rome entière excitant le murmure,
Ira dans son palais réveiller l’empereur.
C’est lui qui le dernier saura son déshonneur.
Si cependant, d’une âme à la crainte asservie,
Tu n’oses sur-le-champ renoncer à la vie :
Si tu mets tant de prix à quelques jours de plus,
Obéis : mais prononce un généreux refus,
Ou perds, en consentant, tout le soin de ta gloire,
Le glaive du licteur attend ce cou d’ivoire.
— Ainsi l’homme n’a rien à demander aux cieux !
— Voulez-vous un conseil ? laissez faire les dieux.
L’homme leur est plus cher qu’il ne l’est à lui-même.
Il s’abuse en courant après le bien suprême ;
Car les dieux, mieux Instruits de son propre intérêt,
Font ce qui lui convient, et non ce qui lui plaît.
Entrainés par nos vœux dans une erreur profonde,
Nous voulons une épouse et la voulons féconde ;
Mais ils savent déjà ces dieux plus clairvoyants,
Ce que seront un jour la mère et les enfants.
Ce n’est pas toutefois que leur bonté propice
Refuse d’accueillir un pieux sacrifice.
Veux-tu les voir sourire et céder à tes vœux ?
Demande un esprit sain dans un corps vigoureux :
Une âme que jamais aucun trouble n’agite ;
Que n’épouvantent point les fables du Cocyte ;
Qui ne s’égare pas de souhait en souhait ;
Qui regarde la mort comme un dernier bienfait ;
Qui sache supporter la fortune contraire,
Modérer ses désirs, réprimer sa colère ;
Qui préfère à la table, aux plaisirs, au repos,
Les fatigues d’Hercule et ses douze travaux.