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Livrerait-il sa femme à cette abjection ?
Et jamais a-t-on vu, contre un pieu, dans l’arène,
L’épouse d’Asylus s’escrimer hors d’haleine ?

Théâtre de discorde et de transports jaloux,
La couche nuptiale est l’enfer des époux :
On n’y saurait dormir ; et c’est lorsqu’une femme
De quelque tort secret s’accuse au fond de l’âme,
Qu’on la voit s’emporter comme un tigre en fureur,
Chez elle sans raison prendre tout en horreur ;
Tantôt persécuter ton affranchi fidèle ;
Tantôt te supposer une amante nouvelle ;
Et pour te mieux trahir, les yeux noyés de pleurs,
En soupirs de commande exhaler ses douleurs.
Sot époux ! ses soupirs ont pour toi mille charmes :
Tu crois que c’est l’amour qui fait couler ses larmes ;
Tu le crois, et ces pleurs longtemps étudiés,
Par tes lèvres déjà je les vois essuyés.
Oh ! que si tu pouvais, de cette digne épouse
Adultère à la fois effrontée et jalouse,
Ouvrir le portefeuille et lire les billets,
La belle découverte, et les touchants secrets !
Tu la surprends aux bras d’un insolent esclave ;
Au sein d’un chevalier tu la vois qui te brave ;
—Parle, si tu le peux, parle, Quintilien,
Parle, et pour l’excuser, cherche quelque moyen.
— Je n’en saurais trouver. — Eh bien ! parle toi-même.
— Moi ! dit-elle, affectant une assurance extrême ;
Quoi ! ne sommes-nous pas convenus entre nous,
Toi, de vivre à ton gré ; moi, de suivre mes goûts !
Pousse des cris, confonds et le ciel et la terre ;
Je suis homme ! Telle est leur audace ordinaire.
Prenez-les sur le fait, la honte dans leur cœur
Ne fait que redoubler la haine et la fureur.


D’où provient, diras-tu, cette horrible licence ?
Dans quelle source impure a-t-elle pris naissance ?