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Tu légueras les tiens aux amants de ta femme.
—Vite qu’à cet esclave un gibet soit dressé.
— Quel crime a-t-il commis ? qui vous l’a dénoncé ?
Avez-vous des témoins ? il faut au moins l’entendre.
Pour mettre un homme à mort, on ne peut trop attendre.
— Un homme ! l’imbécile ! est-ce un homme en effet
Qu’un misérable esclave ? au reste, il n’a rien fait :
Soit : mais il périra : je le veux, je l’ordonne ;
Et ma seule raison, c’est l’ordre que j’en donne.
Ainsi tu fléchirais sous le joug conjugal ;
Mais non ; elle renonce au voile nuptial,
Court porter chez un autre un amour infidèle,
Et bientôt, désertant cette maison nouvelle,
Ces bandeaux, ces festons, ces portiques sacrés
D’un feuillage encor vert récemment décorés,
Elle fuit, et chez toi revient avec audace,
Dans ton lit méprisé redemander sa place.
Voilà comme, en cinq ans, une femme chez nous,
Beau sujet d’épitaphe, a souvent huit époux !


Plus de repos pour toi, plus de paix sur la terre,
Si ta femme près d’elle a conservé sa mère.
Sa mère lui dira par quels adroits moyens,
On outrage un époux, on dissipe ses biens ;
Comment, en femme habile et sans se compromettre,
On fait à son amant parvenir une lettre ;
Et s’il faut endormir d’incommodes argus,
C’est elle qui bientôt les aura corrompus :
Près de sa fille alors elle appelle Archigène,
Écarte un drap trop lourd qui lui pèse et la gène ;
L’adultère introduit, de désirs palpitant,
S’excite dans un coin au plaisir qui l’attend.
Penses-tu qu’à l’honneur cette mère infidèle,
Puisse engager ta femme à vivre autrement qu’elle ?
D’une mère sans mœurs l’amour-propre blessé,
A corrompre sa fille est trop intéressé.