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Votre Syphax vaincu, votre char triomphal,
Et, sans venir ici m’étourdir davantage,
Retournez en Afrique avec votre Carthage.

Grâce pour mes enfants, grâce, dieu de Délo,
Et toi, Diane aussi, laisse tes javelots,
Mes enfants n’ont rien fait, n’immolez que leur mère,
S’écriait Amphion ; mais, sourd aux cris d’un père,
L’immortel a saisi son arc et son carquois ;
La flèche part : il frappe, il immole à la fois
Et ce troupeau d’enfants et leur mère elle-même,
Niobé qui se croit, en son orgueil extrême,
Plus noble que Latone et sa postérité.
A quoi sert la vertu ? qu’importe la beauté,
Lorsqu’une épouse altière, abusant de ses charmes,
S’en fait, pour te vexer, un prétexte et des armes,
Et que, par des discours pleins d’aigreur et de fiel,
De ces dons précieux elle corrompt le miel ?
Aussi, quel homme épris des vertus de sa femme,
Sentit jamais pour elle une assez vive flamme,
Pour n’être pas tenté sept fois au moins par jour,
De maudire en secret l’objet de son amour ?


Il est des torts moins grands, des travers à la mode,
Dont pourtant avec peine un mari s’accommode.
Quoi de plus fatiguant que cette vanité,
Qui, croyant que le grec sied seul à la beauté,
Tourne en petite grecque une campanienne,
Ou change une toscane en pure athénienne ?
Toujours du grec, lorsque sous le toit d’un Romain,
Il est bien plus honteux d’ignorer le latin !
Crainte, colère, amour, chagrin, secrets de l’âme,
Tout en grec ; c’est en grec qu’une amante se pâme.
Qu’à de jeunes beautés on passe un tel travers ;
Mais soupirer en grec après soixante hivers !
Vieille infâme, crois-tu que l’on puisse à ton âge
Te permettre en public cet obscène langage,